Ainsi ai-je entendu : une fois, le Bienheureux séjournait au parc d’Anāthapiṇḍika, situé au bois de Jēta, près de la ville de Sāvatthi.

En ce temps-là, un jour, le brāhmane Jāṇussōṇi, à la mi-journée, étant monté dans une voiture toute blanche tirée par des juments, se promenait autour de la ville de Sāvatthi. Il vit de loin le paribbājaka Pilōtika venant sur la route. L’ayant vu, il dit au paribbājaka Pilōtika : « D’où vient cet honorable Vaccāyana cet après-midi ? »

Le paribbājaka Pilōtika répondit : « Ô ami honorable, je reviens de chez le Samana Gōtama. »

Le brāhmane Jāṇussōṇi demanda : « Que pensez-vous, ô honorable Vaccāyana, à propos de la lucidité de l’intelligence du Samana Gōtama ? Pensez-vous qu’il soit un érudit ?

– Ô ami honorable, qui suis-je pour connaître la lucidité de l’intelligence du Samana Gōtama et de son érudition ! La lucidité de l’intelligence du Samana Gōtama et son érudition peuvent être connues seulement par quelqu’un comme le Samana Gōtama.

– Vraiment, ô honorable, vous faites le meilleur éloge pour louer le Samana Gōtama !

– Ô ami honorable, qui suis-je pour louer le Samana Gōtama ! Le Samana Gōtama est loué par des gens qui sont dignes de louanges. Il est le meilleur parmi les êtres humains et les êtres divins.

– À la vue de quelle bonne qualité, ô honorable Vaccāyana, pouvez-vous vous dire tellement satisfait de ce Samana Gōtama ?

– Supposons, ô honorable ami, qu’il y ait un homme doué qui fréquente la forêt où se trouvent des éléphants et qu’il entre dans cette forêt. Il y voit une empreinte de pieds grands en largeur et en longueur. Il arrive à cette conclusion : “Sûrement, c’est un grand éléphant.” De même, ô honorable ami, le jour où j’ai vu quatre empreintes [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.” Quelles sont ces quatre empreintes ? Je vois, ô ami honorable, certaines personnes appartenant à la classe des Khattiyas qui sont érudites, expérimentées, qui ont déjà entamé des débats avec les autres, qui sont semblables aux archers qui peuvent couper les cheveux en quatre, qui se promènent en brisant les opinions des autres par leur propre sagesse. Ils entendent dire que le Samana Gōtama viendrait dans tel village ou telle bourgade. Alors, ils élaborent des questions en se disant : “Nous poserons ces questions au Samana Gōtama. Étant questionné ainsi par nous, s’il nous donne telle réponse, alors nous la réfuterons ainsi. Étant questionné ainsi par nous, s’il nous donne une autre réponse, nous la réfuterons également.” Pendant ce temps, ils entendent dire que le Samana Gōtama est arrivé à tel village ou à telle bourgade. Alors, ils s’approchent de l’endroit où se trouve le Samana Gōtama. En abordant des propos doctrinaux, le Samana Gōtama les encourage, leur donne l’enthousiasme, leur apporte la joie. Étant encouragés, enthousiasmés, joyeux, grâce aux propos doctrinaux du Samana Gōtama, ils ne posent même pas de questions. Que dire donc d’une réfutation de leur part ! Déjà, ils sont devenus des auditeurs du Samana Gōtama. Ô honorable ami, le jour où j’ai vu cette première empreinte [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

Et encore, ô ami honorable, je vois certaines personnes appartenant à la classe des Brāhmanes qui sont érudites, expérimentées, qui ont déjà entamé des débats avec les autres, qui sont semblables aux archers qui peuvent couper les cheveux en quatre, qui se promènent en cassant les opinions des autres par leur propre sagesse. […]. Alors, ils s’approchent de l’endroit où se trouve le Samana Gōtama. En parlant de la doctrine, le Samana Gōtama les encourage, leur donne l’enthousiasme, leur apporte la joie. Étant encouragés, enthousiasmés, joyeux, grâce aux propos doctrinaux du Samana Gōtama, ils ne posent même pas de questions. Que dire donc d’une réfutation de leur part ! Déjà, ils sont devenus des auditeurs du Samana Gōtama. Ô honorable ami, le jour où j’ai vu cette deuxième empreinte [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : ”Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

Et encore, ô ami honorable, je vois certaines personnes appartenant à la classe des chefs de grandes maisons qui sont érudites, expérimentées, qui ont déjà entamé des débats avec les autres, qui sont semblables aux archers qui peuvent couper les cheveux en quatre, qui se promènent en cassant les opinions des autres par leur propre sagesse. Ils entendent dire que le Samana Gōtama viendrait dans tel village ou telle bourgade. Alors, ils élaborent des questions en se disant : “Nous poserons ces questions au Samana Gōtama. Étant questionné ainsi par nous, s’il nous donne telle réponse, alors nous la réfuterons ainsi. Étant questionné ainsi par nous, s’il nous donne une autre réponse, nous la réfuterons également. Pendant ce temps, ils entendent dire que le Samana Gōtama est arrivé à tel village ou à telle bourgade. Alors, ils s’approchent de l’endroit où se trouve le Samana Gōtama. En abordant des propos doctrinaux, le Samana Gōtama les encourage, leur donne l’enthousiasme, leur apporte la joie. Étant encouragés, enthousiasmés, joyeux, grâce aux propos doctrinaux du Samana Gōtama, ils ne posent même pas de questions. Que dire donc d’une réfutation de leur part ! Déjà, ils sont devenus des auditeurs du Samana Gōtama. Ô honorable ami, le jour où j’ai vu cette troisième empreinte [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : ”Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

Et encore, ô ami honorable, je vois certaines personnes appartenant à la classe des samanas qui sont des érudits, expérimentés, qui ont déjà entamé des débats avec les autres, qui sont semblables aux archers qui peuvent couper les cheveux en quatre, qui se promènent en cassant les opinions des autres par leur propre sagesse […]. Alors, ils s’approchent de l’endroit où se trouve le Samana Gōtama. En parlant de la doctrine, le Samana Gōtama les encourage, leur donne l’enthousiasme, leur apporte la joie. Étant encouragés, enthousiasmés, joyeux, grâce aux propos doctrinaux du Samana Gōtama, ils ne posent même pas de questions. Que dire donc d’une réfutation de leur part ! Déjà, ils sont devenus des auditeurs du Samana Gōtama. Ô honorable ami, le jour où j’ai vu cette quatrième empreinte [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : ”Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

De cette façon, ô honorable ami, le jour où j’ai vu ces quatre empreintes [de la sagesse] du Samana Gōtama, je suis arrivé à cette conclusion : ”Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

Cela étant dit, le brāhmane Jāṇussōṇi descendit de sa voiture toute blanche, puis, en mettant sa toge sur une seule épaule, en rendant hommage vers la direction où se trouvait le Bienheureux, répéta trois fois cette exclamation de joie : “Hommage à ce Bienheureux qui est l’Arahant et l’Éveillé parfait ; hommage à ce Bienheureux qui est l’Arahant et l’Éveillé parfait ; hommage à ce Bienheureux qui est l’Arahant et l’Éveillé parfait.” Ensuite il dit : “Il serait bon que nous trouvions un jour, quelque part, une occasion pour rencontrer cet honorable Gōtama ; il serait bon que nous trouvions une occasion pour discuter avec cet honorable Gōtama.”

Un jour, le brāhmane Jāṇussōṇi approcha de l’endroit où se trouvait le Bienheureux. Y étant arrivé, il échangea avec lui des compliments de politesse et des paroles de courtoisie et s’assit à l’écart sur un côté. S’étant assis à l’écart sur un côté, le brāhmane Jāṇussōṇi raconta au Bienheureux toute la discussion qu’il avait eue avec le paribbājaka Pilōtika.

Cela étant raconté par le brāhmane Jāṇussōṇi, le Bienheureux lui dit : “Ô brāhmane, pour autant la parabole des empreintes du grand éléphant n’est pas complète. Cependant, ô brāhmane, écoutez comment cette parabole des empreintes du grand éléphant serait complète. Fixez bien votre attention. Je vais vous l’expliquer.”

« Très bien, honorable », répondit le brāhmane Jāṇussōṇi au Bienheureux.

Le Bienheureux dit : « Supposons, ô brāhmane, qu’il y ait un homme qui fréquente la forêt où se trouvent des éléphants et qu’il entre dans cette forêt. Il y voit une empreinte de pieds grands en largeur et en longueur. Si cet homme qui fréquente la forêt est doué, il n’arrive pas pour autant à cette conclusion : “Sûrement, c’est un grand éléphant.” Pourquoi ? Parce que, ô brāhmane, il pense : “Dans la forêt, il existe des éléphants femelles nommées Vāmanikā, de petite taille tout en ayant de grands pieds. Il est possible que cette empreinte de pieds appartienne à l’une d’elles.” Cependant, il suit cette empreinte de pieds et il voit dans la forêt une empreinte de pieds grands en largeur et en longueur et il y voit aussi des arbres hauts avec des marques de frottement causées par le dos d’un éléphant. Si cet homme qui fréquente la forêt est doué, il n’arrive pas pour autant à cette conclusion : “Sûrement, c’est un grand éléphant.” Pourquoi ? Parce que, ô brāhmane, il pense : “Dans la forêt, il existe des éléphants femelles nommées Uccha Kālārikā, de grande taille, tout en ayant des grands pieds. Il est possible que cette empreinte de pieds appartienne à l’une d’elles.” Cependant, il suit cette empreinte de pieds et il voit dans la forêt une empreinte de pieds grands en largeur et en longueur, les arbres avec des marques de frottement causées par le dos d’un éléphant et de hautes branches abîmées par les défenses d’un éléphant et aussi de hautes branches cassées et tombées par terre. Ensuite, il voit un éléphant qui est sous un arbre ou dans une plaine, qui reste debout, ou qui reste assis ou qui est allongé. Ainsi, l’homme arrive à la conclusion : “Le voici, le grand éléphant.”

De même, ô brāhmane, il apparaît dans le monde un Tathāgata qui est l’Arahant, l’Éveillé parfait, parfait en Savoir et parfait en Conduite, bien arrivé à son but, connaisseur du monde, incomparable guide des êtres qui doivent être guidés, instructeur des dieux et des humains, l’Éveillé, le Bienheureux. Ayant compris le monde constitué des dieux, des Mārās, des Brahmās et des humains, des samanas et des brāhmanes, par sa propre connaissance spécifique, il communique cette compréhension aux autres. Il enseigne une doctrine bonne en son début, bonne en son milieu, bonne en sa fin, bonne dans sa lettre et dans son esprit, il exalte la conduite sublime parfaitement pleine et parfaitement pure. Un chef de famille, ou un fils de chef de famille, ou quiconque ayant repris la naissance dans telle ou telle famille entend ladite doctrine. Ayant entendu cette doctrine il atteint une confiance sereine en le Tathāgata. Parce qu’il a atteint la confiance sereine et qu’il en est pourvu, il réfléchit ainsi : “Cette vie de foyer est pleine d’obstacles, elle est un chemin poussiéreux ; la vie sans foyer est le plein air. À qui demeure dans le foyer, il n’est pas facile de pratiquer la conduite sublime entièrement pleine, entièrement pure, parfaite comme une conque. Il faut donc que, m’étant rasé les cheveux et la barbe, ayant revêtu mon corps des vêtements kāsāyas [d’un religieux], je quitte mon foyer pour mener une vie sans foyer !”

Alors, plus tard, un jour, il abandonne l’ensemble de ses biens, quelle qu’en soit la valeur, grande ou petite, il abandonne ses parents et son entourage, quel qu’en soit le nombre, beaucoup ou peu, il se rase les cheveux et la barbe, revêt les vêtements kāsāyas [d’un religieux] et quitte son foyer pour mener une vie sans foyer. Ayant ainsi quitté la maison, ce bhikkhu vit, s’étant maîtrisé lui-même selon les règles du code de la discipline, en évitant de détruire les êtres vivants, il s’abstient de tuer les êtres vivants, il est dépourvu de bâtons et d’armes, il est modeste, il demeure compatissant, bienveillant et il a pleine pitié à l’égard de tous les êtres vivants. Ne prenant pas ce qu’on ne lui donne pas, il s’abstient de prendre ce qu’on ne lui donne pas. Avec patience il accepte seulement ce qu’on lui donne. Par conséquent, il demeure ayant une pensée pure. Ayant renoncé à l’incontinence, il est continent. Il reste écarté de l’incontinence. Il est détaché de cette habitude de masse dite “copulation.” Ne proférant pas de mensonges, il s’abstient des paroles mensongères. Il est partisan de la vérité. Il est sûr, digne de foi, il ne trompe pas les autres par ses paroles. Cela constitue une partie de sa vertu. Ne proférant pas de paroles calomnieuses, il s’abstient des paroles calomnieuses. Ce qu’il a entendu ici, il ne le raconte pas là-bas, pour séparer ceux-là de ceux-ci ; ce qu’il a entendu là-bas, il ne le raconte pas ici, pour séparer ceux-ci de ceux-là. Il ne parle qu’en vue de réconcilier ceux qui sont désunis ou d’accroître l’harmonie de ceux qui sont unis. Il se plaît en l’harmonie, il a son plaisir en l’harmonie, il trouve sa joie dans l’harmonie. Il ne parle que pour créer l’harmonie. Ne proférant pas de paroles grossières, il s’abstient des paroles grossières. Il ne prononce que des paroles irréprochables, agréables à l’oreille, affectueuses, allant au cœur, courtoises, aimables à beaucoup de gens, plaisantes à beaucoup de gens. Ne proférant pas de paroles frivoles, il s’abstient des paroles frivoles. Il prononce des paroles en temps voulu, des paroles véridiques, des paroles sensées, des paroles conformes à la doctrine et à la discipline, des paroles formant un trésor, des paroles munies de raison, opportunes, bien circonscrites, accompagnées d’un sens.

Il s’abstient d’endommager graines et plantes de toutes sortes ; il fait un seul repas, il jeûne le soir et s’abstient de manger hors du temps ; il s’abstient de danses, de chants, de musique, de spectacles amusants ; il s’abstient de porter des guirlandes, des parfums, des onguents, des ornements et des embellissements ; il s’abstient d’utiliser des meubles de valeur, de hauts meubles ; il s’abstient d’accepter de l’or et de l’argent ; il s’abstient d’accepter des grains crus ; il s’abstient d’accepter de la viande crue ; il s’abstient d’accepter des femmes et des jeunes filles ; il s’abstient d’accepter des esclaves mâles ou femelles ; il s’abstient d’accepter des chèvres et des brebis ; il s’abstient d’accepter des coqs et des porcs ; il s’abstient d’accepter des éléphants, des bœufs, des chevaux et des juments ; il s’abstient d’accepter des rizières et de la richesse ; il s’abstient d’envoyer des messagers ou d’aller lui-même [portant des messages] ; il s’abstient de l’achat et de la vente ; il s’abstient de tromper les autres par les balances, par des pièces de monnaie, par des mesures ; il s’abstient de pratiquer la corruption, la ruse, la fraude ; il s’abstient de faire des blessures, des meurtres, des incarcérations, des brigandages, des pillages, des actes violents.

Ce bhikkhu est pleinement satisfait d’un vêtement [religieux] qui lui préserve le corps et d’une boule [de riz qu’il a reçue dans son bol à aumône] dont il sustente son ventre ; partout où il va, il va avec son vêtement [religieux] et avec son bol à aumône. Tout comme un oiseau emporte ses ailes partout où il vole, de même, le bhikkhu, qui est pleinement satisfait, emporte seulement, partout où il va, le vêtement kāsāya [d’un religieux], dont il protège son corps et le bol à aumône dont il sustente son ventre. Pourvu de ce noble corps de vertus, il éprouve en lui-même une joie irréprochable.

Lorsque ce bhikkhu voit une forme matérielle au moyen de son œil, il n’en saisit ni les apparences générales ni les détails car, en conséquence de ce que l’organe de l’œil demeure non maîtrisé, les choses mauvaises et vicieuses, la convoitise et la frustration peuvent s’y introduire ; alors, il se garde contre l’organe de l’œil ; il se met en état de défense contre l’organe de l’œil. Lorsqu’il entend un son au moyen de son oreille, […]. Lorsqu’il reconnaît une notion au moyen de l’organe mental, il n’en saisit ni les apparences générales ni les détails car, en conséquence de ce que le mental demeure non maîtrisé, les choses mauvaises et vicieuses, la convoitise et la frustration peuvent s’y introduire ; alors, il se garde contre l’organe mental ; il se met en état de défense contre l’organe mental. Pourvu de cette noble protection des organes sensoriels, il éprouve en lui-même, une joie non touchée par les souillures.

Ce bhikkhu, allant ou revenant, en est parfaitement attentif et conscient ; regardant devant ou autour de lui, il en est parfaitement attentif et conscient ; étendant ou repliant ses membres, il en est parfaitement attentif et conscient ; portant le saṅghāṭi, le bol à aumône et les cīvaras, il en est parfaitement attentif et conscient ; mangeant, buvant, mastiquant, goûtant, il en est parfaitement attentif et conscient ; déféquant, urinant, goûtant, il en est parfaitement attentif et conscient ; marchant, étant debout, s’asseyant, s’endormant, s’éveillant, parlant, se taisant, il en est parfaitement attentif et conscient.

Ainsi, pourvu de ce noble corps de vertus, pourvu de cette noble maîtrise des facultés sensorielles, pourvu de cette noble attention et compréhension il fréquente une résidence à l’écart, dans un bois, au pied d’un arbre, dans une montagne, une grotte, une caverne, un cimetière, un plateau boisé, un lieu en plein air, une meule de paille. Après avoir terminé sa tournée d’aumônes, après son repas, il s’assied en repliant et croisant ses jambes, posant son corps bien droit, fixant son attention.

Ayant abandonné l’attachement avide pour ce monde, il demeure avec une pensée sans attachement avide, il purifie entièrement sa pensée de l’attachement avide. Ayant abandonné la haine et la colère, il demeure avec une pensée sans haine et sans colère et, ayant pitié et bienveillance à l’égard de tous les êtres vivants, il purifie sa pensée de la haine et de la colère. Ayant abandonné la torpeur physique et mentale et la langueur, il demeure dans la torpeur physique, sans la torpeur mentale et sans la langueur, ayant la perception de la lumière, étant attentif et conscient, il purifie sa pensée de la torpeur physique, de la torpeur mentale et de la langueur. Ayant abandonné l’inquiétude et le remords, il demeure intérieurement pacifié, avec une pensée sans inquiétude et sans remords, il purifie entièrement de l’inquiétude et du remords. Ayant abandonné le doute, il demeure ayant surpassé le doute, sans perplexité touchant les choses bonnes, il purifie entièrement sa pensée de doute.

Ainsi, s’étant séparé de ces cinq obstacles que sont les souillures mentales sous-jacentes, qui affaiblissent la sagesse, s’étant séparé du désir, s’étant séparé des pensées inefficaces, il entre dans le premier jhāna pourvu de raisonnement et de réflexion, qui est joie et bonheur, né de la séparation [des choses mauvaises] et il y demeure. À propos de cela, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne voie.”

En outre, ô brāhmane, ce bhikkhu, ayant mis fin au raisonnement et à la réflexion, entre et demeure dans le deuxième jhāna qui est apaisement intérieur, unification de la pensée, qui est dépourvu de raisonnement et de réflexion, né de la concentration et qui consiste en bonheur. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

En outre, brāhmane, ce bhikkhu, se détournant du bonheur, vit dans l’indifférence, conscient et vigilant, ressent dans son corps le bonheur pur de sorte que les êtres nobles désignent cela “Celui qui, indifférent et attentif, demeure heureux” ; il entre et demeure dans le troisième jhāna. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

En outre, ô brāhmane, s’étant débarrassé du bonheur et s’étant débarrassé de la peine, ayant supprimé la gaieté et la tristesse antérieures, ce bhikkhu entre et demeure dans le quatrième jhāna où ne sont ni plaisir ni douleur, mais qui est pureté parfaite d’attention et d’indifférence. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

En outre, lorsque sa pensée est ainsi concentrée, ainsi purifiée, sans défaut, sans souillure, bien souple, maniable, stable, arrivée à l’impassibilité, ce bhikkhu dirige sa pensée et l’oriente vers le savoir-faire dit “la connaissance qui permet de se rappeler ses demeures antérieures.” Ainsi, il se rappelle ses demeures antérieures, à savoir : une naissance, deux naissances, trois naissances, quatre naissances, cinq naissances, dix naissances, vingt naissances, trente naissances, quarante naissances, cinquante naissances, cent naissances, mille naissances, cent mille naissances [et il se rappelle] diverses périodes d’intégration, diverses périodes de désintégration et il peut se rappeler ses propres demeures antérieures avec leurs traits, avec le détail de faits de la manière suivante : “En ce temps-là, j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Alors étant sorti de cette existence-là, j’accédai à cette autre. Là encore j’avais tel nom, telle famille, telle caste, tel mode de nourriture, j’éprouvais tel plaisir et telle souffrance, j’atteignis tel âge. Alors étant sorti de cette existence-là, j’accédai à cette autre, et ainsi de suite.” De cette façon, il se rappelle ses diverses demeures antérieures. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

En outre, lorsque sa pensée est ainsi concentrée, ainsi purifiée, sans défauts, sans souillures, bien souple, maniable, stable, arrivée à l’impassibilité, ce bhikkhu dirige sa pensée et l’oriente vers le savoir-faire dit : “La connaissance qui permet de voir la disparition et l’apparition des êtres.” Ainsi, avec son œil surhumain purifié qui dépasse la capacité de l’œil humain, il voit les êtres qui sortent d’ici et qui renaissent ailleurs, et il reconnaît comment les êtres sont bas ou élevés, beaux ou laids, heureux ou malheureux, d’après les actes qu’ils ont commis : “Ces honorables êtres vivants ayant une mauvaise conduite par le corps, ayant une mauvaise conduite par la parole, ayant une mauvaise conduite par la pensée, ont insulté les êtres nobles, ont eu des opinions fausses, ont pratiqué des actes suivant ces opinions fausses et, par conséquent, après la dislocation du corps, après la mort, ils sont nés dans la déchéance, dans les destinations mauvaises, dans les états ruinés, dans l’état infernal. Cependant, ces honorables êtres ayant une bonne conduite par le corps, ayant une bonne conduite par la parole, ayant une bonne conduite par la pensée, n’ont pas insulté les êtres nobles, ont eu des opinions correctes, ont pratiqué des actes suivant ces opinions correctes et, par conséquent, après la dislocation du corps, après la mort, ils sont nés dans des destinations bonnes, dans des états célestes.” De cette façon, il reconnaît par l’œil surhumain purifié qui dépasse la capacité de l’œil humain, comment les êtres sont bas ou élevés, beaux ou laids, heureux ou malheureux d’après les actes qu’ils ont commis. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

En outre, lorsque sa pensée est ainsi concentrée, ainsi purifiée, sans défaut, sans souillure, bien souple, maniable, stable, arrivée à l’impassibilité, ce bhikkhu dirige sa pensée et l’oriente vers le savoir-faire dit “la connaissance qui permet d’éliminer les écoulements mentaux toxiques.” Ainsi il reconnaît selon la réalité : “Ceci est dukkha ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est l’apparition de dukkha ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est la cessation de dukkha” ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est la voie vers la cessation de dukkha.” Il reconnaît selon la réalité : “Ceci sont les écoulements mentaux toxiques” ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est l’origine des écoulements mentaux toxiques” ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est la cessation des écoulements mentaux toxiques ; il reconnaît selon la réalité : “Ceci est la voie vers la cessation des écoulements mentaux toxiques”. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” Pour autant, le disciple noble n’arrive pas à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne conduite.”

Lorsqu’il reconnaît lesdits éléments, lorsqu’il les voit, sa pensée est libérée de l’écoulement mental toxique dit “désir sensuel” ; de même sa pensée est libérée de l’écoulement mental toxique dit “volonté de devenir” ; sa pensée est libérée de l’écoulement mental toxique dit “ignorance.” Lorsque la pensée est libérée, la connaissance se produit : “Voici la libération”. Il reconnaît : “Toute naissance nouvelle est supprimée. La conduite sublime est vécue. Ce qui doit être achevé est achevé ; plus rien de demeure à accomplir”. À propos de cela aussi, ô brāhmane, on peut bien dire : “C’est une empreinte du Tathāgata ; c’est un lieu que le Tathāgata a touché au moyen de son corps de sagesse ; c’est un lieu où le Tathāgata a tranché au moyen de ses défenses de sagesse.” À ce moment, le disciple noble arrive à cette conclusion : “Le Bienheureux est un Éveillé parfait. La Doctrine du Bienheureux est merveilleusement exposée. La Communauté des disciples du Bienheureux s’est placée dans la bonne voie.” De cette façon, ô brāhmane, la parabole des empreintes d’un grand éléphant devient complète. »

Cela étant dit, le brāhmane Jāṇussōṇi dit au Bienheureux : “Merveilleux, honorable Gōtama, merveilleux honorable. C’est comme si l’on redressait ce qui a été renversé, ou découvrait ce qui a été caché, ou montrait le chemin à celui qui s’est égaré, ou apportait une lampe dans l’obscurité pour que ceux qui ont des yeux puissent voir. Ainsi, l’honorable Gōtama a rendu claire la Doctrine de maintes façons. Me voici, je prends refuge en l’honorable Gōtama, en la Doctrine et en le groupe des bhikkhus. Que l’honorable Gōtama veuille bien m’accepter comme l’un des disciples associés à partir d’aujourd’hui jusqu’à la fin de ma vie, moi qui ai pris refuge en lui.”

The Middle Discourses

|_A. The First Fifty

|__III. The Chapter of Similes

MN27. Les empreintes de pieds d’un grand éléphant : 1er récit

Translations [29]

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